La cercosporiose noire ou maladie des rayes noires du bananier (nom scientifique : Pseudocercospora fijiensis) est l’une des menaces les plus importantes pour les producteurs de bananes. La cercosporiose noire est causée par un champignon ascomycète qui affecte les feuilles, diminuant ainsi la surface disponible pour la transformation de l’énergie lumineuse en énergie pour le fonctionnement de la plante (procès de photosynthèse).

De plus, les fruits produits par des plantes fortement malades peuvent montrer une réduction significative de la durée de « vie verte ». Pour l’exportation, cela constitue un problème car cela signifie que les fruits mûrissent prématurément pendant l’expédition et sont perdus avant d’être vendus. La plupart des zones tropicales et subtropicales sont touchées, avec des pertes signalées allant jusqu’à 30 à 50 %.

Cette maladie relativement récente est aujourd’hui responsable d’applications intensives de fongicides dans les pays producteurs. Le cultivar de bananier le plus exporté au monde « Cavendish » étant très sensible à la cercosporiose, cette maladie représente naturellement une menace majeure. Le risque est double : une mauvaise gestion des maladies entraîne des pertes de rendement et augmente les coûts de production, et une application non optimale du produit peut avoir des impacts négatifs sur la santé humaine et environnementale. Dans les deux cas, une mauvaise gestion de la maladie entraîne des pertes économiques et a un impact sur les pays producteurs.

 

Symptômes de la cercosporiose noire

La cercosporiose noire est identifiée par la présence de stries ou de taches foliaires. Elles sont d’abord minuscules et jaunes, apparaissant sur la face inférieure des feuilles. Elles deviennent ensuite rougeâtres à brun rouille formant des stries parallèles aux nervures. En quelques jours, les taches atteignent quelques centimètres et virent au brun avec des centres gris clair. Les plantes atteintes de la maladie avancée de la cercosporiose noire peuvent avoir de grandes surfaces de feuilles mortes qui ont perdu leur capacité de produire de l’énergie a partir de la lumière(capacité photosynthétique) , entraînant une diminution de la production. Les bords de la feuille  qui sont souvent les parties les plus touchées, ont tendance à se replier sur eux-mêmes. Les fruits sont plus petits et moins nombreux et ont tendance à mûrir prématurément.

Symptômes de la Cercosporiose Noire

Transmission et cycle de la cercosporiose noire

La transmission de la cercosporiose noire se produit via deux types différents de cellule reproductives, appelées « spores ». Dans le cas de la cercosporiose, ces spores sont transportées par le vent ou l’eau et sont , appelées ascospores et conidies. Les conidies sont dispersées pendant la pluie, lorsque les gouttelettes d’eau sont éclaboussées sur d’autres feuilles de la même plante ou sur des plantes voisines. Les ascospores sont transportées par le vent sur de plus longues distances. Ils pénètrent dans la feuille par les stomates et se développent en colonies. Après l’infection, les hyphes émergent des stomates et se transforment en conidiophores avec de nouvelles conidies ou se développent à travers la surface et infectent les stomates adjacents. Les deux types de spores peuvent germer en deux ou trois heures dans des conditions humides, mais l’infection prend au moins deux ou trois jours dans des conditions optimales (humidité élevée et température > 20 °C).

 

Contrôle de la cercosporiose noire

Dans les plantations d’exportation, la cercosporiose noire est contrôlée par des applications fréquentes de produits phytosanitaires et des pratiques culturales, telles que l’élimination des feuilles atteintes, un espacement adéquat des plantes et un drainage efficace au sein de la plantation. Parmi les matières actives les plus utilisées dans les fongicides contre la cercosporiose noire, il y a le mancozèbe, qui est maintenant interdit en Europe, donc dans les Antilles Françaises, mais reste utilisé dans d’autre pays producteurs. Les huiles paraffiniques sont souvent utilisées comme adjuvants pour les fongicides lors des applications.

La lutte biologique représente une alternative à l’utilisation de produits chimiques qui peut être réalisable lorsque la pression de la maladie est limitée. Par exemple, les champignons du genre Trichoderma sont utilisés comme agents de lutte biologique contre de nombreux agents pathogènes, et ont montré un certain succès dans la lutte contre la cercosporiose noire. Parmi les avantages de l’utilisation d’agents biologiques figure le faible risque d’impacts néfastes sur l’environnement et la santé humaine.L’utilisation de cultivars résistants est une autre méthode de lutte possible ; cependant, cette stratégie est entravée par le temps nécessaire pour développer de nouveaux cultivars de bananier qui répondent aux demandes des consommateurs, et la variabilité de l’agent pathogène, qui s’adapte rapidement aux nouveaux gènes de résistance. Toutes ces pratiques s’avèrent coûteuses. Par exemple, l’application de fongicides nécessite l’utilisation d’avions ou de machines spécialisées, des installations pour mélanger et charger les fongicides, du travail humain et le coût élevé des produits phytosanitaires. En effet, les coûts de contrôle pouvent atteindre 15 à 20 % du prix de détail final des bananes.

 

Les indicateurs de la Cercosporiose noire

Compte tenu des coûts élevés du contrôle de la cercosporiose noire et du danger de nouvelles résistances contre les fongicides actuellement utilisés, il est important de développer un plan de traitement efficace maximisant l’efficacité et évitant les applications inutiles.Parmi les outils qui peuvent aider à cette tâche figure l’utilisation d’indicateurs de severité de la maladie.

Qu'est-ce qu'un indicateur ?

Les indicateurs sont des mesures statistiques ou des valeurs utilisées pour mesurer les conditions actuelles ou pour prévoir les tendances futures. Ils offrent une vision synthétique d’une situation et donnent des indications utiles et rapides qui peuvent aider à la prise de décision. En agriculture, les indicateurs sont généralement considérés comme des outils d’évaluation et de gestion. A titre d’exemple, un indicateur bien connu de la performance agricole est le taux « rendement/surface cultivée ».

Afin d’aider les producteurs à lutter contre la cercosporiose noire, différents indicateurs ont été développés depuis les années 70 aux Antilles et au Cameroun. Ces indicateurs ont été intégrés dans un système d’alerte contre la cercosporiose jaune et noire par les chercheurs du CIRAD (l’institution française leader de la recherche en agronomie tropicale) . Ce système repose sur une détection précoce des attaques, qui font l’objet d’un suivi régulier et permettent de quantifier l’évolution de l’épidémie. Les symptômes observés sont évalués et  transformés en scores qui peuvent être utilisés pour décider l’application phytosanitaire lorsque le risque est élevé.

 

Comment utiliser au mieux les indicateurs pour la Cercosporiose noire: Sigatocare

: une nouvelle application pour desktop et smartphone a automatisé le calcul des indicateurs et facilité l’enregistrement des observations.De plus, l’application Sigatocare propose un nouveau type d’indicateur, qui intègre ceux classiquement calculés par le Cirad, pour évaluer la nécessité des applications phytosanitaires dans les jours à venir. Il est exprimé selon une clé de couleur (rouge : risque élevé, jaune : risque moyen, vert : risque faible). Pour la développer, ITK a formalisé le raisonnement expert du Cirad derrière l’emission d’alertes phytosanitaires. Pour plus d’informations sur Sigatocare, cliquez ici.